Jean de la Croix et Mère Teresa ont dû se retourner dans leurs saintes tombes : d’après le très émérite Mgr Michel Aupetit, nos nuits spirituelles sont la conséquence de notre incapacité à chercher Dieu. Ou alors du fait que nous sommes morts – tweet du 18 mai 2022 : « Jésus est vraiment ressuscité ! Il est vivant ! L’avez-vous rencontré ? Si vous ne l’avez pas rencontré, c’est sans doute que vous ne l’avez pas cherché ou bien, peut-être, que vous êtes déjà morts. » Ce récent tweet du Donald Trump de la mystique a soulevé, dans la tweetosphère, la verve et la moquerie de nombreux catholiques, en particulier de ceux qui se targuent de théologie.
Depuis son départ mouvementé du diocèse, chaque jour amène sa récolte de tweets plus improbables les uns que les autres. Certains sont mignons et gentils – « Moïse avait reçu les commandements de Dieu écrits sur une table de pierre. Jésus les a inscrits sur notre cœur » –, mais la plupart soit remettent en question les textes du Magistère de l’Église catholique, soit sont carrément offensants. S’y déploie souvent une théologie doloriste, culpabilisante, qui fait volontiers référence à Satan : « Devant Dieu, nous aurons à répondre du nombre de vies que nous avons engendrées de par le Christ et du nombre de morts que nous avons générées de par Satan. » Chacun en prend pour son grade : les sportifs de haut niveau auront apprécié le fait que « le sport entretient la piètre satisfaction de surpasser les autres et l’illusion de dépasser ses limites. L’exercice physique, en revanche, cultive le don qu’est notre corps, alors que la compétition le contraint et l’abîme ». Les femmes recourant à l’avortement ont pu lire, le 31 mars dernier, une improbable comparaison entre les fœtus humains et les moustiques camarguais ; le 21 mai, les politiciens et leurs électeurs se sont fait traiter de « lourdauds grossiers ».
Mgr Emeritus est certes sousmis aux contraintes du tweet ; un format court qui ne peut représenter le tout d’une pensée. Mais nous sommes en droit d’attendre plus de subtilité et de compassion de la part d’un archevêque. Sa logorrhée à l’emporte-pièce est approximative, voire fausse, au niveau théologique et parfois insultante. Quant à ses digressions sur le cléricalisme dans l’Église catholique, le célibat et la chasteté des prêtres, on se demande vraiment, au vu de son propre gouvernement dans le diocèse de Paris et de son rôle à l’égard de la Ciase, s’il est vraiment le mieux placé pour prodiguer des conseils aux autres.
Ne vous méprenez pas, il y a dans ce billet plus d’inquiétude que de jugement. Si certains tweetonautes se moquent ouvertement de ses tweets absurdes et pathétiques, c’est aussi parce qu’il est tragique de voir un frère en Christ se ridiculiser et perdre de sa crédibilité. Mais, surtout, il est urgent que les amis les plus proches de Mgr Aupetit l’entourent en ce moment difficile et l’aident à prendre soin de sa santé, notamment mentale.
Luna Vernassal
Photo : François-Régis Salefran, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons