Ce n’est pas l’un des moindres mérites de ce livre que de rendre à cet homme, qui a risqué sa vie pour en sauver d’autres, la richesse et la complexité de son parcours. « On l’a présenté un peu comme un moine soldat. On a découvert un homme très contemporain, divorcé, avec une recherche intérieure forte et des appartenances multiples : Église catholique, franc-maçonnerie », explique Jacques Duplessy – que nos lecteurs connaissent bien –, coauteur du livre avec Benoît Leprince. Pour tenter de le cerner au plus près, ils ont rencontré sa mère, son épouse, ses frères, mais aussi ses amis et collègues. À travers leurs témoignages se dessine le portrait d’un homme passionné, enthousiaste, généreux, droit, exigeant ; un « ambitieux lucide » qui a redécouvert la foi en 2002 et s’est initié à la franc-maçonnerie en 2008. Une double appartenance qui peut paraître paradoxale mais ne fait que traduire une liberté intérieure intense et une quête d’absolu sur le plan spirituel comme professionnel.
« Son parcours militaire a été très brillant (major de l’École militaire interarmes et de l’École des officiers de la gendarmerie), reprend Duplessy, mais avec deux échecs importants : Saint-Cyr et l’École de guerre. À chaque fois, il avait su rebondir. » Ce qui frappe chez Beltrame, c’est une cohérence entre l’intime et le public, sa foi chrétienne, ses idéaux spirituels et ses valeurs militaires. Certains ont voulu voir dans son geste le « sacrifice d’un chrétien », mais le mot même de « sacrifice » est récusé par sa famille comme par les gendarmes, qui rappellent que Beltrame – parfois comparé à Maximilien Kolbe – avait bien l’intention d’en sortir vivant.
Ils soulignent aussi qu’il n’est pas intervenu sur ordre mais en homme libre. Un homme libre, courageux, avec une très haute idée de son devoir. Et c’est bien cette extraordinaire humanité dont rend compte ce livre.
Sophie BAJOS de HÉRÉDIA
Arnaud Beltrame, le héros dont la France a besoin, Jacques Duplessy, Benoît Leprince, Éditions de l’Observatoire, 192 p., 17€