Le premier des Anglais devant l’histoire, Sir Winston Churchill, aimait à dire que « le succès n’est pas final, l’échec n’est pas fatal, c’est le courage de continuer qui compte ». Ces derniers temps à Londres, peut-être cette formule est-elle à même de saisir l’abîme qui manifestement sépare la reine Élisabeth II de son Premier ministre. Un Premier ministre dont 60 % des Britanniques voudraient se débarrasser, à l’heure où les cérémonies pour le jubilé des soixante-dix ans de règne de la « Queen Elizabeth » ont représenté un plébiscite triomphal, pour elle bien plus encore que pour la monarchie.
Bien que hué par la foule pendant les célébrations du jubilé de la reine, et malgré la colère qui gronde après des mois de scandale, le Premier ministre britannique Boris Johnson a encore sauvé son poste ce lundi en remportant un vote de défiance de sa majorité. Près de trois ans après sa victoire triomphale dans les urnes, le dirigeant de 57 ans a encore démontré sa capacité à se sortir des situations les plus périlleuses. Sur les 359 députés conservateurs ayant voté – à bulletin secret –, 211 se sont prononcés en sa faveur, contre 148 qui souhaitaient l’évincer. Ce qui fait quand même un groupe considérable de frondeurs susceptibles de paralyser l’action du gouvernement. Bref, il est encore possible que l’inoxydable monarque de 96 ans enterre « politiquement » son actuel Premier ministre, le quatorzième depuis 1952…
Autant que la formule de Sir Winston « le courage de continuer », « intégrité » est le mot qui résume parfaitement la longue existence d’une souveraine qui aura traversé les tempêtes de l’histoire et de sa propre famille avec dignité. Ce mot désigne tout aussi parfaitement ce dont manque Boris Johnson. Rappelons le terrible jugement de l’ancien speaker de la chambre des communes, John Bercow : « Son instinct naturel n’est ni l’ouverture, ni la transparence, ni même de rendre compte de ses actes, mais uniquement de se demander narcissiquement comment se tirer au mieux de toute situation délicate en faisant payer les pots cassés par des tiers. »
À l’opposé, au cours de sa longue vie, l’intégrité d’Élisabeth II lui aura permis de suivre les pas de Winston Churchill quand il écrivait : « Pour s’améliorer, il faut changer. Donc, pour être parfait, il faut avoir changé souvent. »
Henri Lastenouse
Photo : Number 10 (CC BY-NC-ND 2.0)