« Pour 326, contre 115 : l’Assemblée nationale a adopté le projet de loi ! » Au Palais Bourbon, en ce mardi 29 juin, la voix qui s’élève du perchoir est teintée de satisfaction. Si la formule est usuelle pour Richard Ferrand, ce dernier ne dissimule pas sa fierté et profite bien volontiers des quelques minutes d’applaudissements qui suivent sa déclaration. Et pour cause, après deux années de navette parlementaire, le projet de loi relatif à la bioéthique est bel et bien adopté !
En réalité, le débat pour l’adoption du texte présenté en Conseil des ministres le 24 juillet 2019 a rapidement laissé place à un affrontement sommaire entre opposants et partisans de « la PMA pour toutes », promesse de campagne d’Emmanuel Macron en 2017. L’assistance médicale à la procréation (ou PMA, pour « procréation médicalement assistée ») n’était jusqu’alors qu’un substitut de la procréation naturelle. Ainsi, le désormais ancien article L2141-2 du Code de la santé publique dispose que « l’assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l’infertilité d’un couple ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité » ; le couple étant entendu comme formé par « l’homme et la femme ».
Aux oubliettes ces dispositions archaïques, c’est une extension remarquable du dispositif qui a été votée ! Le critère de la finalité médicale est supprimé, tout comme celui d’être un couple hétérosexuel, et le recours aux techniques de PMA est désormais remboursé par l’assurance maladie. Autrement dit, avec ce projet de loi, l’assistance médicale à la procréation devient un véritable droit autonome des femmes, en couple comme célibataires. Par ailleurs, les enfants nés d’une PMA pourront, à leur majorité, accéder à des données non identifiantes du donneur. La problématique de la filiation est également abordée puisque les couples de femmes devront établir devant notaire une reconnaissance conjointe de l’enfant avant sa naissance.
Nombreux sont ceux qui fustigent cette « PMA sans père », véritable réforme de société – et sûrement la seule du quinquennat. Mais, par-delà l’opposition prévisible mais non moins défendable d’associations soutenues par l’épiscopat catholique, le plus acharné des adversaires a finalement été le Sénat. C’est ainsi que, début 2020, la chambre haute du Parlement remanie largement le texte et demande notamment que le dispositif ne soit pas remboursé par la Sécurité sociale. Mais la contestation ne s’arrête pas là et se radicalise davantage encore lorsqu’en deuxième lecture les sénateurs rayent purement et simplement « la PMA pour toutes » du texte. Une ténacité peu républicaine à l’heure où 67 % des Français sont favorables à cette réforme.
Reste qu’en adoptant le projet de loi bioéthique, la France devient le onzième pays de l’Union européenne à autoriser la PMA pour toutes les femmes. Mais c’était sans compter sur une saisine du Conseil constitutionnel vendredi dernier ; ou quand l’entêtement tourne au ridicule…
Louise Brandily