La transition écologique est créatrice nette d’emplois. Au niveau mondial, elle devrait ainsi engendrer une création nette de 18 millions d’emplois tout en permettant une réduction de 41 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030. Cela représente 4,5 emplois soutenus pour un emploi perdu.
La relance post-Covid-19 est donc l’occasion d’anticiper la conversion des emplois qui pourraient être perdus dans la décennie à venir s’ils ne sont pas transformés.
Rénovation énergétique des bâtiments
Les bâtiments résidentiels et tertiaires représentent environ 19 % des émissions annuelles de gaz à effet de serre françaises et sont responsables de 46 % de la consommation nationale d’énergie finale. Pus de 6 millions sont qualifiés de passoires énergétiques.
L’application des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, telle que modélisée dans le scénario « Relance verte », permettrait de quasiment doubler le nombre d’emplois temps plein (ETP) d’ici 2022 pour atteindre 278 000 emplois soutenus. L’augmentation du rythme des rénovations permettrait de doubler à nouveau les ETP soutenus entre 2022 et 2030, pour atteindre 406 000 en 2030. Les emplois créés seraient des emplois qualifiés, non délocalisables et dans des segments aujourd’hui encore insuffisamment développés.
Pour atteindre ces objectifs, l’État devrait investir 11 milliards d’euros supplémentaires par an par rapport aux quatre actuellement financés. Compte tenu du volume important de rénovations globales nécessaires pour atteindre ces objectifs et du besoin en formation des artisans pour répondre à cette demande, le WWF France propose un palier intermédiaire à 4 milliards d’euros supplémentaires sur 2020-2023 avec une montée progressive à 11 milliards d’euros par an en 2030.
Énergies renouvelables
Le scénario « Relance verte » soutiendrait 256 000 emplois d’ici à 2030, soit une augmentation de près de 70 % des ETP soutenus dans le secteur des énergies renouvelables par rapport à 2019. Ces emplois concernent principalement les développeurs, les fabricants d’équipements, les constructeurs, les exploitants, les opérateurs de maintenance et les producteurs de matières premières pour les bioénergies. Pour cette relance verte, l’État devrait investir 4 milliards d’euros supplémentaires par an dans les énergies renouvelables entre 2020 et 2023 et 7 milliards d’euros supplémentaires par an entre 2023 et 2030.
Transports en commun et ferroviaires
Ils émettent en moyenne cinq fois moins de CO2 par voyageur que les véhicules particuliers.
Avec un plan de soutien ambitieux de 2,5 milliards d’euros supplémentaires par an entre 2020 et 2023, puis 4 milliards entre 2024 et 2030, les emplois soutenus par le secteur des transports ferroviaires et des transports en commun pourraient augmenter de près de 40 % entre 2019 et 2022, pour atteindre 126 000 ETP. En 2022, la filière des transports en commun urbains est celle qui stimulerait le plus les retombées économiques du secteur : elle générerait 55 % de la valeur ajoutée si un scénario « Relance verte » est poursuivi. En 2030, dans un tel scénario, c’est la filière ferroviaire qui contribuerait à plus de la moitié de la valeur ajoutée générée. La création d’emplois dans ce secteur repose principalement sur les infrastructures, c’est pourquoi les emplois générés ne le sont pas systématiquement sur le long terme, mais ils ne sont pas délocalisables. Cependant, les investissements dans la modernisation du réseau sont indispensables et vont être des créateurs importants d’emplois.
Transports individuels automobile et vélo
La voiture particulière génère près de la moitié des émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports en France ainsi que de la pollution atmosphérique, responsable de 48 000 décès prématurés par an en France, la plaçant comme deuxième cause de mortalité évitable à l’échelle du pays.
Un plan de relance verte qui stimulerait fortement le secteur des véhicules à très faibles émissions pourrait permettre de soutenir 328 000 emplois en 2030, ce qui revient à multiplier par trente le nombre d’emplois soutenus dans les secteurs liés à la production et la distribution de voitures électriques et hybrides rechargeables et à la mise en place de bornes de recharge par rapport à 2019.
Pour réaliser un tel scénario, l’État devrait investir 1 milliard d’euros supplémentaire par an sur la période 2020-2023 puis 3 milliards d’euros supplémentaires par an sur la période 2024-2030. L’accélération de la vente de véhicules électriques devrait permettre d’atteindre 22 milliards d’euros de valeur ajoutée générée en 2030.
Les ETP soutenus par les activités liées au vélo seraient quant à eux plus que triplés dans le scénario « Relance verte », pour atteindre 352 000 ETP directs, indirects et induits en 2030. Une part importante de ces emplois concerne la construction des pistes cyclables et les matériels de stationnement de vélos ainsi que le secteur de la logistique, en particulier les coursiers et les employés à vélo de La Poste.
Pour réaliser un tel scénario, l’État devrait investir 2 milliards d’euros par an supplémentaires entre aujourd’hui et 2030 dans les infrastructures cyclables. La filière des vélos pourrait ainsi générer 23 milliards d’euros de valeur ajoutée en 2030.
Rapport à lire sur www.wwf.fr
La relance verte vue d’ailleurs
Une étude de l’Université d’Oxford parue en mai 2020, dont l’un des coauteurs est le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz, démontre que les mesures de relance vertes sont plus efficaces que des mesures de relance budgétaire traditionnelles. Les chercheurs s’appuient pour cela sur l’analyse de 196 plans de relance mis en œuvre après la crise financière mondiale de 2009 : 63 « verts », 117 « incolores » et 16 « bruns ». Les projets verts créent plus d’emplois, offrent un meilleur rendement à court terme par dollar dépensé et permettent de réaliser des économies à long terme. Les 231 fonctionnaires des finances, banquiers centraux et autres experts mondiaux interrogés par les auteurs de l’étude ont également indiqué que les investissements dans l’éducation, les énergies propres ou encore dans la recherche et développement propre avaient les impacts les plus positifs.
Morgane Pellennec