Le « populisme » est, à l’échelle du monde, le mouvement politique qui montre la plus forte vigueur. Il s’est incarné aux États-Unis par la voix de Donald Trump, au Brésil avec Jair Bolsonaro, en Grande-Bretagne avec les partisans du Brexit et Boris Johnson. Il atteint la Hongrie de Viktor Orbán comme la Pologne de Mateusz Morawiecki. Il menace quasiment partout en Europe, en France bien sûr, mais aussi en Italie, en Espagne, en Grèce, et même au nord de l’Europe, en Allemagne, sous les traits de l’AfD, ou au Danemark. C’est ce même populisme qui attise les fièvres en Afrique et agite les « convois de la liberté » au Canada.
En France, chacun et chacune, voulant se parer d’une légitimité populaire, se laisse plus ou moins aller à des accents populistes dont la caractéristique est d’en appeler aux « vraies gens », en les opposant aux élites « hors sol » qui ne savent rien de la « vraie vie ».
Il est vrai que la démocratie, comme son nom l’indique, trouve sa légitimité dans le peuple, mais pas n’importe lequel. À son fondement se trouve le « demos » athénien, lequel n’est pas une foule informe mais un ensemble de citoyens structuré par des règles politiques. La Bible raconte peut-être la même chose lorsque, dans le livre de l’Exode, elle note que la foule nombreuse qui quitte l’Égypte est aussi accompagnée d’un « ramassis » de gens. Les interprétations de ce terme « érèv rav » n’ont pas manqué. S’agit-il d’étrangers qui se seraient joints au peuple ou, plus simplement, du peuple avant que celui-ci ait reçu la Loi, laquelle le constitue effectivement en peuple ? À plusieurs reprises, et dès le début de l’Exode, Dieu fait cette promesse : « Vous serez mon peuple et je serai votre Dieu. » Ce peuple est constitué par son entrée dans l’Alliance et le respect de la Loi, celle des Dix Commandements. C’est donnant-donnant, un peuple, une loi, un dieu.
La faute des populistes est de mettre le peuple avant la loi. Si les grands États démocratiques ont sanctuarisé une loi supérieure, défendue par des cours ou des conseils supérieurs, Cour suprême, Conseil constitutionnel, Cour européenne des droits de l’homme… c’est bien pour mettre la loi à l’abri de l’émotion et de l’humeur des foules. La loi nous garde de nous-mêmes, et cela est juste et bon.
Christine Pedotti
Photo : TapTheForwardAssist, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons