La réponse n’est pas simple. Rappelons cependant que, si les femmes n’ont pas obtenu le droit de vote dans l’entre-deux-guerres, elles le doivent à l’opposition des radicaux, laïcs et anticléricaux, qui considéraient que laisser voter les femmes c’était donner leur bulletin au curé. Les temps ont bien changé et, pour que les « curés » aient de l’influence, il faudrait qu’on en trouve encore.
Pour autant, les évêques, comme à chaque échéance présidentielle, produisent un texte de conseil et d’orientation*. Il ne s’agit pas de tenir la main des électeurs et électrices mais de leur donner des éléments de discernement. Les années passant et leur influence directe s’amenuisant, les évêques catholiques se contentent désormais de quelques bonnes paroles générales. On se souviendra qu’en 2017, avant le deuxième tour, ils avaient refusé de se prononcer entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron, comme si, finalement, l’un et l’autre avaient des bons et des mauvais côtés que seule la préférence politique, et non la morale, pouvait départager.
Aujourd’hui, la question d’un héritage chrétien menacé est manipulée par des courants profondément réactionnaires à droite. Les responsables catholiques ne seraient-ils pas dans leur rôle en rappelant que l’Évangile n’appartient ni aux puissants ni aux gagnants de l’histoire et que son « héros » est un homme humilié, condamné par la conjonction des puissances politiques et religieuses de son temps ?
Beaucoup de catholiques, encore pratiquants ou pas, évidemment, ne sont pas dupes des instrumentalisations politiques de Zemmour et de ses épigones. Pour autant, la parole des responsables catholiques, même dévaluée par la crise des abus, a encore du poids bien au-delà des cercles catholiques. C’est pourquoi cette prise de position a toujours de l’importance.
Autrefois, le pape Pie XI, qu’étrangement nul ne songe à canoniser, a condamné, à travers trois encycliques, le fascisme, le communisme et le nazisme. Le pape François pour sa part a pris des positions sans ambiguïté tant sur l’environnement que sur l’accueil des étrangers et les inégalités Nord-Sud.
Mais il semble que les évêques soient bien moins papistes que le pape…
Christine Pedotti
* TC reviendra plus longuement sur ce texte la semaine prochaine.