Le coronavirus est-il en train de réussir là où Attac et le mouvement altermondialiste ont échoué, en révélant l’aberration économique, sociale et environnementale d’une division internationale du travail fondée, et ce jusqu’au plus petit segment de la chaîne de production et de consommation, sur l’application de la théorie des avantages comparatifs. Pénurie de pièces détachées automobiles, de paracétamol, effet du boycott décrété par Donald Trump sur le système sanitaire iranien, décroissance forcée qui rend plus respirable l’atmosphère des villes chinoises, le virus nous administre une leçon de choses dramatique sur les dégâts de la mondialisation. Au point d’être qualifié, dans un français douteux, de « game changer » par un ministre de l’Économie qu’on avait connu moins critique.
Hélas, plus que de gonfler les voiles idéologiques de l’altermondialisme, le vent d’inquiétude suscité par l’épidémie est surtout en train d’être récupéré et alimenté par les partisans du localisme et du repli national, lesquels confondent mesures barrières et fermeture des frontières. On sait que les postes de douanes n’arrêtent pas plus les virus que les nuages nucléaires – et sont bien moins efficaces que le lavage des mains.
Mais, s’ils semblent s’opposer, nationalisme identitaire et néolibéralisme mondialisateur partagent la même conception de l’humanité, héritée d’un darwinisme dévoyé des intuitions de l’auteur de L’Origine des espèces, dont ils n’ont retenu que le « struggle for life », la compétition pour la survie, qu’il s’agisse de la concurrence entre les économies ou des rivalités entre les nations.
C’est négliger « l’autre loi de la jungle », qui a permis le développement de la vie, végétale et animale, y compris sous sa forme humaine, et qui, de l’organisation de la cellule à celle des sociétés, repose moins sur la compétition que sur la coopération. Ce que nous apprend aussi le coronavirus – et les progrès encore insuffisants de l’Organisation mondiale de la santé en sont une illustration –, c’est que prévenir et gérer les épidémies, comme organiser le village planétaire pour qu’il reste habitable pour l’humanité, nécessiteront de gérer nos interdépendances et donc plus de coopération et d’entraide que de repli ou d’affrontement.
Daniel Lenoir (http://www.daniel-lenoir.fr)
Photo : Daniel Arauz (CC BY 2.0)
Depuis quelques années, des évènements en soi secondaires comme une épidémie similaire à la grippe, déclenchent autant de battage médiatique que si nous étions entrés en guerre. Où que l’on s’informe, on ne parle que de ça ou presque. Passés à la trappe des évènements autrement plus lourds de conséquences que l’élection en Israël ou en Thuringe ! Que le Likoud ait gagné les élections en Israël et que Die Linke soit finalement reconduite à la tête de la Thuringe font moins d’audimat que de compter le nombre de morts du Coronavirus.
La recherche du sensationnel semble être la seule loi. Société de marché ? Société de moutons !