Selon lui, il est trop tôt pour avoir des certitudes ; certes le virus a été identifié et séquencé mais « on ignore trop d’éléments pour pouvoir dire si on s’inquiète à tort ». Ainsi le taux dit de « létalité » du virus, c’est-à-dire les morts rapportés aux cas de maladie identifiés, autour de 2 %, en fait un virus beaucoup plus dangereux que la grippe, mais il est possible que le nombre de malades soit plus important et que ceux qui ont des symptômes peu graves ne soient pas déclarés. Auquel cas la contagion serait plus importante mais la dangerosité moindre. « Le parallèle avec la grippe est juste aujourd’hui, ajoute-t-il, mais il ne le sera peut-être plus demain. »
À quoi faut-il être vigilant pour ne céder ni à un optimisme béat ni à la panique ? « Il faut, explique-t-il, rester accroché aux faits, les observer et être attentif à plusieurs éléments qui peuvent varier. Le taux de reproduction (Ro) indique le nombre de personnes contaminées par chaque malade. Il semble se situer entre 1,4 et 2,5. S’il augmente, le risque de contagion augmente lui aussi. De la même façon, il faut savoir si le virus est contagieux pendant le temps d’incubation, alors que la personne ne présente encore aucun symptôme. On l’a pensé, mais c’est moins sûr au moment où nous nous parlons. » Sachant qu’on estime le temps d’incubation à 10 à 14 jours, il est possible que le virus se soit répandu alors que le cordon sanitaire n’était pas encore établi autour de Hubei, la province de Chine la plus touchée.
De la même façon, il n’existe aujourd’hui pas de données précises concernant le périmètre de contagion. « On a dit environ un mètre, mais on a des indications de distances plus grandes, ce qui augmenterait la dangerosité. Si on découvre qu’un porteur est contagieux à 4 ou 5 mètres, imaginez ce qui se passe s’il prend un bus ou un métro… On ne peut pas exclure – mais au moment où je vous parle, on n’y est pas – une croissance exponentielle. Ce qu’on observe, c’est que les mesures drastiques prises en Chine, pour l’instant, ne ralentissent pas la progression de la maladie. »
À ces incertitudes s’ajoute la possibilité que le virus subisse une mutation. Dans quel sens ? « On ne peut pas le savoir. Le virus de la grippe H1N1, repéré au Mexique en 2009, a été considéré, à raison, comme très dangereux, et puis il a muté et est devenu beaucoup moins virulent. »
Quand on lui demande vers quoi on va, William Dab reste très prudent : « Compte tenu des informations que nous avons, tous les scénarios sont ouverts. On en saura plus dans quelques jours, d’autant que des dizaines d’équipes travaillent à travers le monde mais, indiscutablement, la menace est réelle. »
Propos recueillis par Christine Pedotti
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